Amiante

L’amiante : un sujet toujours d’actualité

L’amiante a été massivement utilisé pendant plus d’un siècle dans différents secteurs dont ceux du bâtiment et des travaux publics, en raison de ses propriétés spécifiques et de son faible coût d’extraction. Classé cancérogène dès 1977 par le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC), l’usage de l’amiante en France est interdit depuis 1997. Toutefois, de nombreux matériaux contenant de l’amiante sont encore en place aujourd’hui et constituent autant de sources d’exposition pour les professionnels et l’ensemble de la population.

Qu’est-ce que l’amiante et où en trouve-t-on ?

L'amiante est un minéral fibreux de la famille des silicates, minéraux très répandus dans la croûte terrestre. Présents naturellement dans les roches, les silicates extraits sont ensuite transformés en fibres minérales par un processus mécanique pour pouvoir être utilisées par l’industrie.

 Il existe de nombreux affleurements naturels d’amiante dans le monde. En France, les principaux se situent dans les Alpes occidentales, en Haute-Corse et en Nouvelle-Calédonie. Le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières) a produit des cartes permettant d'identifier les zones susceptibles de contenir des fibres d’amiante dans les roches et les sols naturels.

Pourquoi l’amiante a-t-il été utilisé et dans quels secteurs ?

Pratiquée depuis l'Antiquité, l'extraction d'amiante a commencé à se développer après 1860, avec la découverte de grands gisements et sous l'impulsion de l'industrie textile. L'exploitation industrielle et commerciale n'a ensuite cessé d'augmenter, et ce jusqu'en 1975, en raison de ses propriétés physiques et chimiques particulières. Les fibres d’amiante résistent au feu, aux agressions chimiques, aux frottements et à la traction et présentent notamment une faible conductivité thermique et électrique. Ces propriétés, associées au faible coût d’extraction de l’amiante, ont favorisé l’utilisation massive des fibres d’amiante sous de multiples formes et dans de nombreux domaines tout au long du XXe siècle, en France, comme à l’étranger.

Les deux variétés minéralogiques d’amiante qui ont été exploitées et commercialisées sont :

  • les serpentines, dont est extrait le chrysotile ou amiante blanc ;
  • les amphiboles, dont sont extraites l’anthophyllite, l’actinolite, la trémolite et les deux types les plus utilisés : l’amosite (ou amiante brun) et la crocidolite (ou amiante bleu).

Ce sont ainsi plusieurs milliers de produits à utilisation industrielle ou domestique qui ont été fabriqués pour l'isolation thermique d'équipements chauffants, de faux-plafonds, de joints, ou la fabrication de composés de construction comme les plaques ondulées, des éléments de façade, des gaines de ventilation, des canalisations, etc.

En France, l ‘utilisation d’amiante a atteint son plus haut niveau dans les années 1970, avec environ 150 000 tonnes par an. Elle a ensuite été progressivement restreinte jusqu'à son interdiction totale en 1997, date correspondant également à l’interdiction de fabrication et d’importation de produits amiantés. Cependant, il subsiste des matériaux amiantés, en particulier dans les bâtiments mais aussi dans certains revêtements routiers dont le recyclage a pu être pratiqué jusqu’en 2013.

Quelles sont les sources d’exposition à l’amiante ?

Les principales sources d’exposition sont liées :

  • aux interventions sur matériaux et produits manufacturés contenant de l’amiante ;

  • aux activités de traitement et d’élimination des déchets amiantés ;

  • aux interventions sur matériaux naturels contenant de l’amiante.

Quelles sont les populations les plus exposées à l’amiante ?

Les travailleurs

Les travailleurs constituent la population la plus exposée à l’amiante. Il est possible de distinguer deux grands types d’exposition professionnelle à l’amiante :

  • les expositions actives continues et discontinues :  
  • les expositions continues sont connues chez les travailleurs ayant eu des activités d’extraction, de transformation et d’utilisation primaire de l’amiante. Dans ces situations, les concentrations en amiante auxquelles les professionnels étaient exposés n’étaient pas forcément stables mais les expositions à ces concentrations présentaient une durée relativement longue. 
  • les expositions discontinues sont rencontrées chez les travailleurs dont l’activité implique des interventions sur des matériaux contenant de l’amiante. C’est notamment le cas de tous les professionnels réalisant des travaux de maintenance ou d’entretien sur des produits et matériaux contenant de l’amiante comme les canalisations en amiante ciment ou les dalles de sol en vinyle amiantées.
  • les expositions professionnelles passives : Ces expositions concernent les personnes qui travaillent soit à proximité de travailleurs intervenants sur des matériaux contenant de l’amiante, soit dans des locaux où les matériaux amiantés présents dans la structure des bâtiments se dégradent.

Depuis l’interdiction de l’amiante en 1997, les activités d’extraction, de transformation et d’utilisation primaire de l’amiante ne sont plus pratiquées en France. Cependant, de nombreux matériaux contenant de l’amiante sont encore en place dans des cloisons, portes coupe-feu, faux plafonds, tuyaux, dalles de sol, etc. et constituent autant de sources d’exposition à l’amiante. 

Pour plus de détails, il est possible de consulter le guide de l’INRS répertoriant les situations professionnelles exposant à l’amiante lors d’interventions sur des matériaux ou équipements susceptibles de libérer des fibres d’amiante.

Aujourd’hui, les principales professions concernées par les risques d’inhalation de poussières d’amiante sont :

  • Les travailleurs des entreprises de retrait d’amiante ;
  • les salariés du BTP ;
  • les professionnels du BTP (secteur de la construction) en charge des démolitions ou de réhabilitation ;
  • les professionnels du second œuvre du BTP, de l'entretien ou de la maintenance (plombier, électricien, chauffagiste, peintre…) ;
  • les salariés travaillant dans le traitement des déchets ;
  • les salariés intervenant sur des terrains amiantifères.

D’une manière générale, les concentrations mesurées lors d'expositions professionnelles sont largement supérieures à celles rencontrées pour la population générale.

Le reste de la population

L’exposition non professionnelle à l’amiante est plus difficile à évaluer, en raison des faibles concentrations en fibres le plus souvent rencontrées, et du manque de données concernant les fréquences et durées d’exposition ainsi que la nature des fibres.

Les expositions à l’amiante de la population générale peuvent être d’origine :

  • para-professionnelle (personnes exposées aux poussières d’amiante rapportées au domicile par des travailleurs) ;
  • environnementale passive liée à l’existence d’une pollution à l’amiante à l’intérieur de bâtiments publics et privés ;
  • domestique liées à l’existence d’objets ménagers contenant de l’amiante : panneaux isolants, planche à repasser, grille-pain, etc. ou à des interventions sur des matériaux contenant de l’amiante intentionnellement ajouté ou non;
  • environnementale liée à  la proximité d’affleurements naturels d’amiante ou la proximité de mines et usines de transformation d‘amiante ou de carrières exploitant des roches contaminées par de l’amiante.

Du fait de la diversité des situations d’exposition, les niveaux d’exposition rencontrés en population générale sont très variables.

Quels sont ses effets sur la santé de l’amiante ?

La morphologie et la dimension des fibres sont deux critères déterminants du pouvoir pathogène de l’amiante. D’autres facteurs interviennent également dans les propriétés toxiques des fibres d’amiante, notamment leur composition chimique et leur réactivité de surface.

La principale voie d’entrée des fibres d’amiante dans l’organisme étant l’inhalation, les risques pour la santé concernent principalement des maladies du système respiratoire.

Cependant, il est également possible d’être exposé à l’amiante par ingestion, notamment via la consommation d’eau contaminée par la dégradation de canalisation en amiante-ciment ou des sources naturelles. Des études se sont donc intéressées aux effets de l’amiante sur les organes digestifs. En revanche, il n’existe aucune donnée sur l’exposition par voie cutanée.

Les cancers

Toutes les variétés d’amiante sont classées comme substances cancérogènes pour l’Homme (catégorie 1A) par l’Union européenne et comme agents cancérogènes certains (groupe 1) par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC).

Les principaux cancers liés à une exposition à l'amiante sont : 

  • le cancer du poumon, première cause de mortalité des sujets exposés à l'amiante, risque encore accru par une exposition combinée à la fumée de tabac,
  • le mésothéliome, cancer touchant essentiellement la plèvre (membrane entourant les poumons) mais aussi le péritoine (membranes entourant les viscères) et le péricarde (membrane entourant le cœur). Aujourd’hui, l’amiante est le seul facteur de risque avéré du mésothéliome. D’autres facteurs, comme les rayonnements ionisants et certains virus, sont aujourd’hui également suspectés d’entraîner le développement d’un mésothéliome.

Le cancer du poumon et le mésothéliome sont des pathologies progressives et peuvent se manifester avec un temps de latence de 20 à 40 ans, voire plus.

Un lien avéré entre l’exposition à l’amiante et le cancer de l’ovaire et du larynx a également été établi par le CIRC en 2012

D‘autres cancers sont également suspectés, avec toutefois à ce jour un niveau de preuve insuffisant chez l‘Homme : le cancer colorectal, le cancer du pharynx et le cancer de l‘estomac.

Autres pathologies

L’inhalation de fibres d’amiante peut entrainer d’autres pathologies de la plèvre et pulmonaires non cancéreuses comme :

  • l’asbestose, maladie typique d’une exposition prolongée à l’amiante. L’asbestose résulte d’une réaction du tissu pulmonaire vis-à-vis des fibres respirées. Cette réaction se traduit par une sclérose du tissu, aussi appelée fibrose pulmonaire, qui réduit les capacités respiratoires et peut, dans les cas les plus graves, entraîner une insuffisance respiratoire. Le risque et la gravité de l’asbestose dépendent de la durée et du niveau d’exposition à l’amiante ;
  • des plaques pleurales : lésion ou fibrose d’une plage circonscrite du tissu pleural. Ce sont des lésions non cancéreuses, généralement asymptomatiques considérées comme un marqueur d’exposition passée à l’amiante ;
  • des pleurésies et des fibroses (ou épaississements) pleurales, qui peuvent provoquer douleurs thoraciques, toux et gêne respiratoire.

Combien de personnes sont concernées en France ?

En 2007, l’INRS estimait entre 1 et 2 millions le nombre de travailleurs potentiellement exposés à l’amiante lors d’activités d’entretien ou de maintenance, dont 900 000 dans le secteur du bâtiment. 

Selon les dernières données de l’assurance maladie de 2014, le nombre des maladies professionnelles reconnues liées à l’amiante a atteint un pic en 2007 (6292 cas).

Les maladies liées à l’amiante représentent aujourd’hui la deuxième cause de maladies professionnelles et la première cause de décès liés au travail (hors accidents du travail).

Selon un rapport du Haut Conseil de la Santé Publique publié en 2014, d’ici 2050, le nombre de décès par cancer du poumon dus à l’amiante serait de 50 000 à 75 000, auxquels s’ajoutent de 18 000 à 25 000 décès par mésothéliome. Ce chiffre est sous-estimé puisqu’il n’intègre pas les décès par cancer du larynx ou de l’ovaire liés à l’exposition à l’amiante.

En 2005, le ministère en charge de la santé a estimé l’impact financier de l’indemnisation des victimes entre 1,3 et 1,9 milliard d’euros par an. Selon les mêmes auteurs, le coût cumulé sur vingt ans de la prise en charge des victimes de l’amiante serait compris entre 26,8 et 37,2 milliards d’euros.

Quelle est la réglementation en vigueur en France et en Europe ?

Si les dangers de l’amiante sont connus depuis le début du XXe siècle en France, son usage a été réglementé à partir de 1977 et interdit vingt ans plus tard, en 1997. Au niveau européen, l'annexe XVII du règlement (CE) n° 1907/2006, entrée 6, interdit au 1er janvier 2005 la fabrication, la mise sur le marché et l'emploi des fibres d'amiante et des articles et mélanges auxquels elles ont été délibérément ajoutées.

Depuis, plusieurs plans d’actions intergouvernementaux ont été élaborés afin d’améliorer la prévention des risques liés l’amiante et appuyer le développement d’actions en faveur de la rénovation et de l’efficacité énergétique, dans un souci de prévention de la sinistralité.

Quelles sont les mesures de protection ?

Pour les travailleurs 

La réglementation en matière de prévention des risques professionnels liés à l’amiante a été entièrement révisée depuis 2012.

 

La protection des travailleurs vis-à-vis du risque lié à une exposition à l’amiante fait l’objet de dispositions règlementaires spécifiques qui viennent compléter les mesures de prévention générales en milieu professionnel. Ainsi, afin de limiter les risques pour ses salariés, la règlementation française oblige les employeurs à mettre en œuvre notamment :

  • des mesures des niveaux d’empoussièrement : la concentration moyenne en fibres d'amiante, sur huit heures de travail, ne doit pas dépasser dix fibres par litre ;
  • l’information et la formation des salariés ;
  • des mesures relatives à l’organisation du travail, au suivi des expositions, au traitement des déchets et à la protection de l’environnement du chantier.

D’une manière générale, les activités susceptibles de provoquer l’émission de fibres d’amiante sont interdites aux jeunes travailleurs et aux travailleurs temporaires.

Pour la population générale

Les expositions passives liées au bâti sont causées par la dispersion de fibres dans l’air lors de l’occupation simple ou à l’occasion d’interventions sur des matériaux et composants amiantés dans des immeubles bâtis (habitation, bureau, établissement recevant du public, etc.), notamment lors d’actions de ponçage, perçage, découpe ou friction, etc. Ainsi, en France, les propriétaires, les locataires et les occupants des immeubles bâtis dont les permis de construire ont été délivrés avant 1997 sont concernés par une réglementation spécifique visant à repérer, surveiller et au besoin agir sur les matériaux contenant de l’amiante. Les occupants de bâtiments contenant de l’amiante doivent en être informés.

Le portail  notre-environnement.gouv.fr  présente les principaux éléments de cette réglementation, et les principaux textes de référence sont consultables sur le site Internet du ministère en charge de la santé.

Des fibres d’amiante aux particules minérales allongées : vers une nouvelle appellation ?  

Les « fragments de clivage » partagent la même composition chimique que les fibres amiante mais présentent une morphologie et une origine différentes. La question de la toxicité de ces fragments de clivage fait l’objet de débat au niveau scientifique. Du fait de ces incertitudes et de la difficulté de les distinguer formellement des fibres d’amiante, la communauté scientifique emploie désormais le terme générique de « Particules minérales allongées » ou PMA.

En France, des données relatives à l’exposition de la population générale et professionnelle aux PMA en général sont en cours d’acquisition.

Avis et rapports en lien avec l'article

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